On le répète à l’envie depuis plusieurs jours à présent, le record du Trophée Jules Verne ne sera pas battu cette année. Les petits centres dépressionnaires et autres zones de hautes pressions disséminés dans le Pacifique et en Atlantique Sud notamment, auront eu raison des ambitions, du talent et de la hargne des deux prétendants, IDEC SPORT et Spindrift 2. Restent le sens marin, l’envie viscéral de faire marcher au mieux, et jusqu’au bout une formidable machine de course. Le désir de partager jusqu’aux derniers bords une cohésion amicale forgée au fil des milles entre six navigateurs internationaux, et l’esprit de compétition qui dicte inconsciemment la meilleure manière d’appréhender jusqu’à la ligne d’arrivée les mille et un obstacles dressés sur la route de ce prestigieux record. IDEC SPORT, après 43 jours d’intense navigation, aborde avec la même envie qu’au premier jour les derniers 2 700 milles de route théorique à parcourir, fermement décidé à signer à Ouessant le meilleur chrono possible.
« Ils ne connaissent pas où se situe le curseur de la modération » Francis Joyon s’amuse visiblement de l’entêtement mis par chacun de ses cinq hommes d’équipage à tirer toujours et encore le meilleur de leur maxi trimaran IDEC SPORT. « On a connu cette nuit des conditions de mer très chaotiques, qui rendaient notre progression très difficile » poursuit-il. Une information que les chiffres de la nuit n’attestent pourtant pas, les vitesses du bateau ayant rarement chuté en deçà des 30 noeuds. IDEC SPORT prolonge à grande vitesse sa chevauchée pourtant bien éloignée de la route directe. « L’anticyclone des Açores nous oblige à filer vers le nord ouest et le continent américain. Nous étions ce matin à moins de 950 milles de la Caraïbe » explique Francis. Une configuration peu gratifiante en gain vers l’arrivée, mais qui changera drastiquement dès que Joyon et ses hommes franchiront, sans trop de peine selon les routages, la face occidentale de ces zones de calme, pour entrer sans transition dans de forts régimes d’ouest. « Ce sera ensuite l’état de la mer qui déterminera le niveau de nos performances » poursuit Joyon. « Mais il nous sera possible de demeurer en bordure des grosses dépressions, dans un « range » de vent le plus maniable possible ».
Les estimations d’arrivée demeurent dans ces conditions toujours très floues. IDEC SPORT a souvent prouvé durant ce tour du monde sa capacité à faire mentir les routages. On table cependant pour une arrivée à Ouessant dans la journée de vendredi 8 janvier prochain.