Incroyable. IDEC SPORT a repris 170 milles sur le chrono à battre, en une seule nuit ! Plus de 310 kilomètres. Les hommes de Francis Joyon passent à la caisse, comme on dit dans le jargon des régatiers. Et ils le font très bien, à des vitesses supersoniques. Plus que 130 milles de retard.
On tourne le dos, on va dormir quelques heures… et on a du mal à croire les longitudes et les chiffres qui s’affichent : 300 milles de retard hier soir et seulement 130 ce matin ! Comme hier, comme avant-hier, comme lundi, il faut se pincer pour y croire. Rappelons qu’on partait de 800 milles de retard dimanche !
Quoiqu’il advienne ensuite, la chevauchée fantastique d’IDEC SPORT dans l’Océan Indien restera dans les annales : jamais un multicoque n’était allé aussi Sud, jamais un multicoque n’était allé aussi droit vers le but dans cette portion légendaire du tour de la planète. A 33 nœuds ce matin, cap à l’Est, Francis Joyon, Bernard Stamm, Alex Pella, Clément Surtel, Boris Herrmann et Gwénolé Gahinet foncent, foncent, foncent… Aucun répit dans cette attaque furieuse et des bénéfices comptables qui continuent de tomber dans l’escarcelle du grand trimaran rouge à un rythme dingue : 8 milles de repris toutes les demi-heures en ce moment !
Il y a au moins trois explications à cela. La première est qu’ils vont vite, très vite. N’oublions pas que tenir des moyennes à 33 nœuds implique des pointes à 40… La deuxième est qu’ils vont droit, très droit et très proches de la route directe. La troisième est qu’au même moment de son record, le Banque Populaire V était obligé de remonter vers le nord à des vitesses relativement faibles pour lui (autour de 25 nœuds) pour deux raisons : grosse tempête en cours plus au sud et présence d’icebergs. En bateau à voile comme en vélo, quand vous allez tout droit pendant que votre concurrent doit prendre des chemins détournés, les bénéfices sont forcément substantiels. En outre depuis quelques heures la moyenne à la journée d’IDEC SPORT dépasse les 700 milles ! L’équivalent de 1300 kilomètres terriens. A la voile, donc…
Repasser devant dès aujourd’hui ?
On vous imagine déjà sortir la calculette : à raison d’une moyenne de 15 milles repris par heure, IDEC SPORT pourrait faire jeu égal voire repasser devant le chrono de référence dans un peu moins de 9 heures, soit dès cet après-midi ! Prudence. C’est possible – et ce serait juste fantastique – mais ce n’est pas tout à fait certain. D’abord parce que jusqu’à ce soir plane toujours une légère incertitude sur le fait de bien rester en avant de la dépression tropicale en provenance de Madagascar, celle dont la trajectoire nous occupe depuis quatre jours. C’est très, très bien engagé… à condition de ne rien casser d’ici là (et si possible pas après non plus, sachant que le bateau est à 100% après 18 jours de mer). D’autre part, IDEC SPORT pourrait être obligé à plus ou moins long terme de remonter légèrement vers le nord lui aussi (et donc d’engranger moins de bénéfices en milles repris, par effet de géométrie appliquée). Mais c’est bien tout ce qu’on trouve ce matin pour éviter de sombrer dans un optimisme béat qui serait somme toute légitime.
A ce propos, il ne sera guère utile de comparer les temps de passage à l’aplomb du cap Leeuwin, puisque celui d’IDEC SPORT se fera bien plus au sud que celui du temps de référence… et que le but du jeu d’un tour du monde n’est pas d’aller visiter l’Australie ! Ce qui compte, c’est la distance gagnée vers le cap Horn. Surveillons donc de très près les pointages aujourd’hui. Il se passe quelque chose de grand sur un trimaran rouge qui fonce dans la nuit, à l’autre bout du monde, par 53 degrés Sud.
En bref.-
Après 18 jours et 4h30 de mer, à 7h30 heure française ce jeudi 10 décembre 2015, IDEC SPORT navigue à 30,3 nœuds par 53°22 Sud et 101°37 Est, à un peu moins de 500 milles de l’aplomb du cap Leeuwin, (sud-ouest de l’Australie). Cap à l’Est (76°). Retard sur le chrono à battre : – 130 milles.