Le maxi-trimaran IDEC SPORT en terminera ce soir avec la première moitié de son tour du monde. Il devrait dépasser vers 19 heures les 11 160 milles théoriques parcourus, constituant la moitié du parcours total, entre Ouessant et Ouessant, via les trois grands caps, Espérance, Leeuwin et Horn. Francis Joyon et ses hommes ont « avalé » ce demi tour du monde à 24,2 nœuds de vitesse moyenne. Ils ont en réalité déjà couvert 13 200 milles sur le fonds, à l’hallucinante allure moyenne de 28,7 nœuds. Cette performance les place, au début de leur 19ème jour de course, en approche de la Nouvelle Zélande, avec une avance de 1 060 milles sur le détenteur du Trophée Jules verne, Banque populaire V. A l’orée du plus grand océan du monde, le Pacifique, c’est une problématique pour le moins paradoxale qui étreint Joyon et son étonnant commando, comment ralentir un bateau qui ne demande qu’à mordre dans la vague et dévorer l’océan ? La juste et nécessaire préservation du bateau, et la crainte de naviguer plus vite que la dépression et tomber dans les calmes qui la précèdent incitent aujourd’hui les Joyon, Audigane, Pella, Surtel, Stamm et Gahinet à réfréner les ardeurs de leur insatiable monture.
« Nous avons établi à bord un système similaire au permis à point » s’esclaffe de sa coutumière jovialité le Catalan Alex Pella. Bousculé ces dernières 48 heures par une méchante houle travers à la marche du bateau, l’équipage de Francis Joyon se doit de ralentir la folle course en avant du maxi-trimaran IDEC SPORT. « C’est un amusant paradoxe » poursuit Francis, « Nous tentons de battre des records de vitesse, mais nous nous triturons les méninges depuis 48 heures pour essayer de ralentir le bateau tout en le préservant. » Les superbes performances inégalées du plan VPLP lancé en 2005 ne doivent cependant pas faire oublier la violence des éléments qui, au terme de 19 jours, dont 8 menés à des vitesses rarement égalées, commence à prélever leur écot d’avaries, même superficielles. « Le plexiglas de la protection du poste de barre n’a pas résisté à une déferlante » explique sans émotion particulière Francis Joyon. « Nous avons dû bricoler un nouveau panneau pour protéger le poste de barre » renchérit Guénolé Gahinet.
Cette mauvaise houle travers à la marche du bateau a heureusement eu l’heur de s’ordonner dans le sens de la progression plein est d’IDEC SPORT. « Nous bénéficions aujourd’hui d’un très bon angle au vent qui souffle toujours à une trentaine de nœuds, avec une mer qui pousse dorénavant sur l’arrière du bateau. Les embruns déferlent moins sur le barreur, et la conduite du bateau devient plus confortable que lors des deux derniers jours » souligne Francis. Tous les voyants, malgré les indicibles petites misères du bord dont nul au sein de ce formidable équipage ne fait état, sont au vert et l’entrée dans les immensités du Pacifique se poursuit sur le même rythme démentiel suivi depuis maintenant 9 jours ! « Nous rêvons au cap Horn, à la remontée vers le Brésil » lâche pourtant le benjamin du bord Guénolé Gahinet. « Un peu de soleil et de chaleur nous ferait le plus grand bien. » Reste à mériter ce Horn de tous les fantasmes. Francis Joyon prévoit dans le Pacifique un relatif ralentissement, ponctué de manœuvres et d’empannages pour « tricoter » avec les systèmes en circulation, en bordure des zones de glace. Un ralentissement bienvenu qui permettra de procéder à quelques réparations et examen général du bateau.
Nouveau meilleur temps de référence intermédiaire en Tasmanie
Après Leeuwin, voici à peine deux jours, c’est le chrono référence Ouessant- Tasmanie, au sud-est de l’Australie, qui est tombé en milieu de nuit dernière, passant de l’escarcelle du maxi-trimaran Spindrift 2 de Yann Guichard et Dona Bertarelli, à celle des Joyon, Pella, Surtel, Gahinet, Stamm et Audigane. Il s’établit à présent à 18 jours, 18 heures et 31 minutes et efface les 20 jours, 4 heures et 37 minutes établis l’an passé par le plus grand trimaran de course au monde et ses 14 marins.